Entrepreneur individuel : la protection de la résidence principale perdure après la cessation d’activité
En cas de cessation d’activité, la protection légale rendant la résidence principale de l’entrepreneur individuel insaisissable perdure aussi longtemps que les droits des créanciers, auxquels la mesure est opposable, ne sont pas éteints. C’est ce qu’a indiqué la Cour de cassation dans un arrêt du 11 septembre 2024.
Le dispositif automatique d’insaisissabilité des biens immobiliers de l’entrepreneur individuel
L’entrepreneur individuel dispose d’un patrimoine professionnel et d’un patrimoine personnel qui est automatiquement protégé. Les biens immobiliers (résidence principale ou secondaire, terrain…) sont inclus dans le patrimoine personnel sans démarche spécifique. La déclaration d’insaisissabilité auprès d’un notaire n’est plus obligatoire.
Si le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel est automatiquement protégé à l’égard de ses créanciers professionnels, il existe des cas dans lesquels cette règle ne s’applique pas, notamment lors d’une condamnation pour fraude fiscale ou en cas de manquements à ses obligations fiscales et sociales.
Lorsque le patrimoine professionnel s’avère insuffisant pour obtenir les crédits nécessaires (acquisition de matériels coûteux par exemple), l’entrepreneur individuel peut choisir de renoncer à la séparation de ses patrimoines. Pour cela, il doit signer un acte de renonciation qui ne concernera que le créancier avec lequel il est lié par l’engagement. Autrement dit, en cas de difficulté de remboursement, ce créancier pourra saisir le patrimoine personnel de l’entrepreneur.
L’insaisissabilité de la résidence principale est maintenue après la cessation d’activité
Dans une affaire récente, la question de l’insaisissabilité de la résidence principale après la cessation d’activité d’un entrepreneur individuel s’est posée.
En l’espèce, un artisan ayant mis fin à son activité professionnelle en 2017 suite à sa radiation du répertoire des métiers (RM) avait été mis en redressement et liquidation judiciaires en 2018. Le liquidateur avait demandé au juge d’ordonner la vente aux enchères du bien utilisé à titre de résidence principale appartenant au gérant et à son épouse.
L’artisan s’était opposé à la vente en raison de l’insaisissabilité de sa résidence principale. En appel, sa requête est rejetée, car la cour considère que l’ouverture de la procédure collective a eu lieu postérieurement à sa radiation au registre des métiers. Selon cette logique, le débiteur ne pouvait donc plus bénéficier des dispositions protectrices prévues par la loi.
Face à cette décision, l’artisan a formé un pourvoi en cassation faisant valoir que l’insaisissabilité de la résidence principale subsiste aussi longtemps que les droits des créanciers auxquels elle est opposable ne sont pas éteints. La Cour de cassation a retenu ses arguments. Elle casse et annule la décision d’appel. Selon elle, la cession de l’activité professionnelle ne met pas fin à l’insaisissabilité de la résidence principale.
L’arrêt du 11 septembre 2024 est intéressant, car il aborde une difficulté qui avait été quelque peu délaissée par la doctrine et la jurisprudence. En effet, seul un arrêt du 17 novembre 2021 s’était penché sur la problématique de la durée d’une mesure d’insaisissabilité portant sur un bien immeuble d’un entrepreneur.